Sur Paris

Un voyage nocturne sur les toits de la capitale


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« Sur Paris est un projet artistique et photographique entamé en 2009 par le photographe Alain Cornu. Par cette série de photographies, cet amoureux de Paris, veut rendre hommage à la ville et amener à la regarder différemment. Donnant à voir ce qui est caché au passant de la rue, antennes, cheminées, travail du zinc et des différents matériaux ainsi que redécouvrir les immeubles et les monuments parisiens sous un nouvel angle.

« J’avais des références personnelles très variées, qui allaient des Aristochats, aux peintures de Caillebotte ou VanGogh, ainsi que des films, des romans, des poésies et des photographies dont celles de Brassaï, bien sûr. Mais également des souvenirs d’étudiant, lorsque je logeais dans les chambres de bonnes. »


Extraits

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Monter sur les toits, c’est aussi s’extraire du quotidien pour devenir témoin plus qu’acteur. Choisissant de travailler à la nuit tombée pendant ce moment si particulier qui renvoit à l’imaginaire et à l’intime. Chaque lucarne, chaque fenêtre allumée étant une vie que l’on peut se représenter.

« Lorsque le projet du livre Sur Paris a vu le jour, les photos seules ne suffisaient pas. Elles manquaient d’un texte qui explorerait le même univers. J’ai donc écris une nouvelle dont l’histoire fait écho aux lieux photographiés. »


Sur Paris

    Cette nuit, il n’arrivait pas à dormir. Son corps était au repos mais d’étranges images dansaient dans sa tête, foules inatteignables, lumières chaotiques, ciels envahis d’oiseaux, un univers incompréhensible qui l’éloignait durablement du sommeil. Du moins le croyait-il. Après un moment, il se leva, s’habilla et sortit de chez lui. Il habitait l’atelier sur cour d’un immeuble parisien. Arrivé dans le hall, il s’arrêta. La rue semblait toute indiquée pour une promenade nocturne pourtant il n’en prit pas le chemin. À sa droite, la cage d’escalier emplie d’une lueur bleutée l’attirait. Ses yeux suivaient les courbes de la rampe qui fuyaient dans les étages. Depuis toutes ces années qu’il habitait là, il n’était jamais allé au-delà du rez-de-chaussée. Sans activer la minuterie, Il emprunta l’escalier.

     Le premier palier l’étonna. Certes, il reconnaissait le bâtiment, son odeur, le tapis de couloir à motifs persans, la corniche à l’antique, la couleur des portes et le glacis des murs, mais ce territoire lui apparut étranger. Il ressentit une nervosité mêlée de crainte en entamant la montée vers les niveaux supérieurs, car si aucune loi n’interdit à un résident de se promener dans son propre immeuble au milieu de la nuit, il avait néanmoins l’impression de transgresser quelque chose. Les paliers se succédaient et une intuition lui laissait penser que ce qu’il faisait avait une logique qu’il comprendrait plus tard. Il atteignit le 6ème étage baigné de silence. Le grand escalier de pierre s’arrêtait là. Une porte entrebâillée donnait accès aux chambres de bonnes, quelques mètres plus haut. Il monta les étroites marches, le souffle raccourci par l’effet combiné de l’ascension, de l’excitation et de la nuit. Il fit une pause, adossé à la balustrade. Cet ultime palier dépourvu de tout décor avait la beauté des coulisses de théâtre et, contrairement au reste de la bâtisse usé de ravalements, lui était comme au premier jour avec ses murs de plâtre et ses boiseries. Des générations de servantes s’y étaient succédées, faisant résonner de leurs talons les parquets, des individus recherchés s’y étaient cachés, des couples s’y étaient aimés et maintenant des étudiants y préparaient leur avenir.

[…]


LEs coulisses

D’un point de vue technique, Alain Cornu emploie une chambre photographique 4 × 5 inches, des objectifs Schneider 110 mm, et 150 mm et le film Kodak Portra 160. Le film argentique utilisé en pose longue, restitue fidèlement les ambiances nocturnes, tant dans les hautes que dans les basses lumières.

« J’apprécie particulièrement la précision et la douceur dans le rendu des matières et des couleurs ».

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